Le rôle des lymphocytes T dans le contrôle de l’infection par le VIH.
Les lymphocytes T jouent un rôle crucial dans le contrôle de l’infection par le virus de l’immunodéficience humaine-1 (VIH). Leur activation et la mise en place d’une réponse immunitaire dépendent de la reconnaissance de peptides viraux, appelés aussi antigènes, présentés à la surface des cellules infectées par le biais des molécules du complexe majeur d’histocompatibilité (CMH). Ces antigènes proviennent de protéines virales produites lors du cycle d’infection de la cellule hôte par le VIH. Les protéines virales sont générées par la machinerie de traduction cellulaire. Les ribosomes cellulaires traduisent les ARNm du VIH à partir de cadres de lecture ouverts (ORF). Il est couramment admis que les antigènes du VIH proviennent uniquement de protéines dîtes classiques du VIH.
Cependant, des progrès récents en génomique et en peptidomique ont remis en question cette définition des ORFs. Des milliers de petites ORF (small ORF, sORF) codent des polypeptides ou des microprotéines. Ces sORFs sont largement répartis le long du génome humain, certains chevauchent les ORFs classiques, sur un cadre différent (appelés cadres de lecture alternatifs (ARF)), mais la majorité se trouve dans les régions en amont (UTR) des gènes connus. Il a été estimé que 85 % des produits de traduction proviennent de régions non annotées du génome humain et principalement de séquences hors cadre de l'ORF. Des études récentes ont révélé qu'une fraction des peptides présentés par les molécules du CMH est dérivée de polypeptides codés par des sORF qui sont spécifiques ou surreprésentés dans les cellules tumorales.
Découverte de nouveaux antigènes viraux.
Dans le contexte du VIH-1, des recherches antérieures ont montré que les lymphocytes T spécifiques du VIH ciblent également les peptides dérivés des ARFs du VIH présentés par les molécules du CMH. Cependant, l'existence d'ARF dans le génome du VIH n’a été démontré jusqu’à présent que par des approches indirectes.
Dans une étude récente, nous avons utilisé une technique appelée profilage des ribosomes (Riboseq) pour identifier toutes les séquences d’ARNm du VIH-1 qui sont activement traduites en protéines dans les cellules T CD4+ infectées. En bloquant la traduction qui se déroule au sein des ribosomes et en séquençant les ARN restés accrochés, cette approche nous a permis de cartographier systématiquement ce qu’on appelle le "translatome" du VIH-1, c’est-à-dire l’ensemble des ARN viraux en cours de traduction dans les cellules infectées. Nous avons ainsi découvert que le génome du VIH-1 contient une centaine d’ARFs correspondant à des sORFs, situées soit en amont des gènes codant les protéines virales classiques soit chevauchants les régions codantes principales du VIH.
De manière remarquable, en utilisant deux approches indépendantes et complémentaires nous montrons que les ARF du VIH codent pour de nouveaux antigènes viraux capables d'induire des réponses larges et puissantes des lymphocytes T. Ces résultats élargissent le spectre des antigènes du VIH qui pourraient être utilisés à la conception de vaccins. Ils pourraient également révéler l’existence de microprotéines ou de pseudogènes du VIH. Ce travail a impliqué des équipes de recherche et cliniciens français et l'Université de Tübingen.
Conférence en anglais.
