Olivier Contensou

Les Recherches philosophiques de Cornélius de Pauw. Démocratie athénienne et déconstruction du mythe spartiate

La thèse est dirigée par le professeur Jean-Marc Narbonne (Université Laval, Québec, Philosophie ancienne) et co-dirigée par le professeur Hans-Jürgen Lüsebrink.

Les Recherches philosophiques sur les Grecs rédigées par Cornélius de Pauw et publiées en 1787 à Berlin, puis en 1788 à Paris, n’ont jamais fait l’objet d’une étude systématique. Le présent travail, qui s’inscrit dans le cadre plus large d’une réflexion sur l’hellénisme politique au XVIIIe siècle, entend combler cette lacune en montrant la portée politique réelle de cet ouvrage fort peu étudié. Après une analyse du contenu politique et polémique qui traverse les Recherches philosophiques sur les Américains et les Recherches philosophiques sur les Égyptiens et les Chinois, nous analyserons l’apologie de la démocratie athénienne et la déconstruction du mythe spartiate que le Chanoine de Xanten propose dans les Recherches philosophiques sur les Grecs. Il s’agira, à partir d’une analyse des sources, anciennes et modernes, et du contexte intellectuel, de cerner, dans une optique comparative, la spécificité de la pensée pauwienne, tant du point de vue de l’originalité de son contenu, par exemple le renversement de perspective que cet ouvrage opère d’un imaginaire républicain dominé par Sparte à un imaginaire dominé par Athènes, que du point de vue de sa méthode, qui nécessitera de déterminer et de définir complètement le concept pauwien de Recherches philosophiques. L’analyse continue des sources, des allusions, des références et des paraphrases nous permettra de mettre au jour l’intertextualité de l’ouvrage et de la situer dans le cadre plus vaste de l’hellénisme politique de l’Aufklärung. Dans le but de contextualiser la position politique du Chanoine, nous établirons un certain nombre de liens et d’oppositions avec des penseurs de premier plan tels Voltaire, Rousseau ou encore d’Holbach, mais aussi avec des auteurs moins connus et moins travaillés tels Vauvilliers, Rochefort, Bordes ou Barthélemy. Ce travail aura aussi pour vocation de revisiter l’opposition entre Athènes et Sparte au siècle des Lumières et de montrer que l’ambivalence d’un Rollin, d’un Montesquieu, ou la défiance explicite vis-à-vis d’Athènes, qui sévissait par exemple chez Rousseau, Mably, souvent au bénéfice de Sparte ou de Rome, était en train de faire place à une admiration. Cette admiration pour Athènes, qui devait subir une éclipse lors de la Révolution française, ira en s’amplifiant au XIXe siècle. Cornélius de Pauw est non seulement le témoin privilégié de ce passage de la défiance à l’admiration, mais aussi un acteur clé de cette transformation.